Notre chroniqueur Maxime Patrault est allé découvrir la pièce de Marius Von Mayenburg.

Synopsis : Une maison à Dresde. Six personnages en lutte pour l’occuper ou la fuir. Dans un voyage effréné à travers l’Histoire allemande de 1935 à 1993, les souvenirs s’affrontent tandis qu’un mythe familial se consume. Quand le vent a tourné, que peut-on révéler d’un côté et entendre de l’autre ? Comment vivre avec le passé, choisi, subi ou hérité ? Une pièce acide sous forme de puzzle.

Plantons le décor : un dimanche de janvier où le vent froid présent saisit le corps.

Dans la file d’attente de la représentation de la Pierre au Théâtre de Belleville, l’humeur du jour serait de se faire une bonne comédie ou un bon thriller non ? Et si on mélangeait le tout pour voir au final une comédie dramatique sur fond d’histoire allemande ?

Voilà j’ai mis les pieds dans le plat, j’ai planté le décor, mis sur le tapis la situation, déterré et déposé la pierre sur la table.

Parlons-en de la pierre, cette pièce mérite une attention particulière dans le paysage du théâtre actuel.

Comment parler de l’histoire allemande et de son héritage au public aujourd’hui ?

Tout simplement en jouant bien et en proposant une mise en scène ludique et inventive.

Cette pièce écrite et publiée en 2010 par Marius Von Mayenburg apporte une modernité sans faille et des mots qui ciblent les maux entre délicatesse et acidité.

La compagnie le temps d’une halte propose grâce à la métaphore de la pierre et du plateau du théâtre de Belleville quelque chose de carré.

C’est millimétré, rythmé, documénté et ça fait du bien.

La mise en scène de Blanche Rérolle montre une certaine justesse dans ce qu’on doit transmette au public entre héritage et discernement historique mais aussi comment gérer une troupe où le défi chronologique a tout son importance.

Apparaître ou disparaître : tout est une question de changement de posture ou de situation temporelle pour laisser place à une seule chose : l’émotion.

Crédits photo Jeremy Breut

On connait l’histoire avec un grand H mais on ne connait pas forcément leurs histoires.

On assiste vraiment à une performance de troupe :

chaque entrée et sortie montre l’importance de qui on est dans l’histoire et comment on va interagir avec l’autre. Les silences sont primordiaux et intenses. Ils permettent d’apporter une intelligence supplémentaire aux mots qui percutent.

La scénographie est d’une intelligence folle pour cibler les moments d’émotions avec un décor certes statique mais qui se transforme habilement par la lumière et le jeu des comédien.nes. C’est le temps qui défile et qui est affiché pour permettre de se repérer dans la période mais une des comédiennes le fait finement en le soulignant d’un simple accessoire et dans sa façon de parler. J’ai trouvé ça ingénieux et excellement bien joué.

La musique apporte l’écho de l’histoire et accompagne la troupe dans un dédale entre tourment personnel et situation de tension. Le moment de danse apporté par une des comédiennes permet de déposer sur le plateau un instant de grâce après une montée forte en émotions

Bon vous allez me dire, qu’est ce qui est négatif dans cette pièce : un petit détail anachronique sur les chaussures et encore c’est tiré par les cheveux.

Je voudrais rentrer plus en profondeur sur des moments qui m’ont marqué mais en fait j’ai eu un coup de cœur pour cette pièce et je vous invite plutôt à y aller pour vous laisser porter par cette belle œuvre et vous faire votre propre avis. Vous avez l’impression que je tourne autour du pot ? Non juste d’une pierre…

Crédits photos Jeremy Breut

Un grand bravo aux comédien.nes et à la mise en scène qui portent cette pièce à bout de bras dans une période pas facile.

INFOS PRATIQUES

LA PIERRE AU THÉÂTRE DE BELLEVILLE

Jusqu’au 31/01/2022

– Lun. : 21h15

– Mar. : 21h15

– Dim. : 17h

Texte de Marius Von Mayenburg

Mise en scène : Blanche Rérolle

Assistanat à la mise en scène : Clémentine Moser

Jeu : Anne Burger, Sophie Deforge, Christabel Desbordes, Garance Morel, Charlie Petit, Marc Stojanovic (en alternance), Hugo Tejero (en alternance)

Scénographie : Clarisse Delile

Création sonore : Arthur Frick

Création lumière : Samy Azzabi